Nous avons tué Stella de Marlen Haushofer
Anna est une épouse trompée. Elle le sait, elle fait comme si elle ne voyait rien, elle donne le change devant son mari, Richard, et ses enfants Wolfgang et Annette. Anna s’étonne même de ne pas ressentir de dégoût quand son cher mari rentre de ses frasques extra-conjugales avec sur lui, le parfum d’une autre.
Mais son malaise devient palpable quand elle accepte de recevoir sous son toit la fille d’une amie, une jeune femme à la beauté qui ne demande qu’à éclore. Anna sent alors qu’elle a fait une grave erreur en mettant Stella et son mari en présence et que l’issue de cette rencontre ne pourra qu’être dramatique.
Ce tout petit livre, je l’ai découvert grâce à la magnifique chronique de Papiercrepon qui m’a donné furieusement envie de le lire. Dès lors quand je l’ai trouvé hier à la librairie, je n’ai pas hésité à mettre mon bon gros thriller de côté pour le découvrir sans attendre. Après tout, je m’étais dit que 73 pages ça allait être très vite avalé.
Eh bien pas si vite que cela en définitive. Certes, ce roman est court mais il est aussi très dense, il fait bloc. C’est une confidence lâchée dans un souffle, sans respiration, sans pause ni prise de recul. C’est une histoire à l’issue fatale, que la narratrice savait inéluctable et qu’elle livre avec le fatalisme qui va avec. Le ton donné à ce roman m’a beaucoup étonnée. Je m’attendais à un récit très humain, mêlant culpabilité, esprit de vengeance, douleur, peur, rempli de failles. Et c’est en fait un récit très froid, presque dénué de sentiments, clinique même qui nous est livré.
Le plus sévère gardien de la morale est celui qui en secret viole la loi, car il sait que l’humanité périrait si tout le monde pouvait vivre comme lui.
De ce fait, je n’ai absolument pas réussi à ressentir la moindre empathie pour Anna, pas plus que pour Stella en vérité, tant je les ai trouvées aussi désincarnées l’une que l’autre. C’est un livre qui parle d’amour, de passion et de trahison mais sans y mettre la vie qui éclate de ces sentiments et de ses sensations : on n’est jamais aussi vivant que quand on aime et quand on souffre d’amour, normalement. Pour cette raison, je n’ai pas eu le coup de cœur que j’espérais mais je reste très heureuse d’avoir découvert cette auteure dont on entend beaucoup parler ces derniers temps avec Le mur invisible.
L’ESSENTIEL
Nous avons tué Stella
Marlen HAUSHOFER
Editions Babel
Sorti en poche le 16/05/1995
73 pages
Genre : roman psychologique
Plaisir de lecture : ❤❤❤
Personnages principaux : Anna et Richard, leurs enfants Wolfgang et Annette et Stella
Recommandation : oui
Lectures complémentaires : Un mariage anglais de Claire Fuller
RÉSUMÉ DE L’ÉDITEUR
Quand une jeune fille de vingt ans passe sous les roues d’un camion, qui oserait mettre en doute la version officielle concluant à une mort accidentelle ? Qui, sinon celle qui avait tout prévu et, impuissante ou indifférente, assista jour après jour à l’émergence du drame ? Voici donc la confession de l’épouse trompée qui a épié sur le visage de l’étudiante éblouie par l’amour, après les émois du début, les troubles de la rupture, l’affolement et, pour finir, le désespoir. Marlen Haushofer dénonce ici l’hypocrisie d’un couple et son meurtre impuni.
TOUJOURS PAS CONVAINCU ?
3 raisons de lire Nous avons tué Stella
- Si vous cherchez un roman sur le thème de l’infidélité et de ses conséquences
- Si vous aimez les romans très courts qu’on avale d’une traite
- Si vous avez envie de découvrir la littérature autrichienne à travers l’une des auteurs remise au goût du jour
3 raisons de ne pas lire Nous avons tué Stella
- Si vous n’aimez pas les plumes sèches et froides
- Si vous ne supportez pas les romans avec des non dits et des allusions
- Si vous cherchez un roman vivant et vibrant
Je ne connais que Robert Musil comme auteur autrichien.
J’ai trouvé des similitudes entre l’écriture des deux auteurs.
Connaissez-vous d’autres auteurs autrichiens avec une aussi belle plume, et cette qualité d’analyse de leurs contemporains tout en économisant les mots de sorte à écrire celui le plus ajusté ?
Merci pour votre critique.
Bonjour, il y a bien évidemment Stefan Zweig dont l’économie de mots est une marque de fabrique, tout autant que la qualité de l’analyse psychologique de ses contemporains. Sinon, de Marlen Haushofer il paraît qu’il ne faut manquer sous aucun prétexte Le mur invisible. Je l’ai dans ma bibliothèque mais ne l’ai pas encore lu. Si jamais vous me devancez, je serais ravie de recueillir votre avis sur ce roman.